Et puis l’amour est arrivé : histoire d’une maternité recomposée

Il y a quelques années, Phoebe nous ouvrait pour la première fois les portes de son histoire. À l’époque, elle était mère célibataire et doula, avançant avec force et tendresse dans une vie qu’elle façonnait jour après jour. Depuis, le fil de son parcours s’est transformé : l’amour, une nouvelle maternité, un foyer recomposé, et une voix plus affirmée encore.Aujourd’hui, Phoebe nous confie à nouveau un fragment de son intimité. Elle revient sur ses choix de femme, sur les bouleversements traversés, sur la solitude fondatrice, et sur la joie de voir naître – au pluriel : un nouvel enfant, de nouvelles convictions, une nouvelle vie.

Renaître femme, mère et épouse

Phoebe, depuis notre dernier échange, votre vie a profondément changé. Comment vous sentez-vous aujourd’hui, en tant que femme, mère et épouse ?

Notre premier entretien avait eu lieu au lancement de talm. J’étais alors mère célibataire, avec mes deux jeunes enfants, et j’exerçais comme doula. C’était une période douce, marquée par une grande force intérieure. J’évoluais seule avec mes enfants, dans notre bulle, et chaque jour, je gagnais un peu plus en résilience.

Depuis, ma vie a été bouleversée. J’ai continué ce chemin en solo durant plusieurs années, jusqu’à ma rencontre avec mon mari. À cette époque, j’étais profondément ancrée dans une indépendance choisie, et j’avais guéri ce que je pouvais guérir seule.

Mais cette rencontre est arrivée au moment juste. Aujourd’hui, je regarde notre vie avec gratitude : mes enfants ont grandi, ils ont trouvé leur place dans une famille aimante. Entendre leurs voix appeler un homme “papa” me touche chaque jour. Je n’oublierai jamais d’où nous venons, car cela fait partie de nous.

Être devenue mère célibataire a été une forme de renaissance. Et aujourd’hui, je me sens forte, douce et entourée. Je me suis permis d’accepter cette protection, parce que je crois que nous la méritons. Je suis la version la plus ancrée et authentique de moi-même que j’aie jamais connue. Et j’en suis fière.

Votre rencontre avec Paul semble avoir été un tournant. En quoi cette nouvelle histoire d’amour a-t-elle enrichi votre rôle de mère et votre vision de la famille ?

Je n’aurais jamais imaginé vivre un amour pareil. À mes yeux, c’était un mythe, une légende inaccessible. Mon expérience de l’amour et des hommes ne m’avait rien montré d’autre : ce n’était pas pour moi. Et j’étais en paix avec cette idée. Mère seule, comblée par mes enfants, j’avais trouvé un équilibre, une force. J’avais compris que les mères célibataires donnent souvent plus que n’importe quelle famille dite “complète”.

Mais avec Paul, tout a basculé. Sa patience, sa douceur, son attention m’émeuvent encore. Être aimée, vraiment, avec mes enfants inclus dans cet amour… c’est indescriptible.

Je n’envisageais plus d’avoir d’autres enfants. Et pourtant, avec Paul, tout est devenu possible. Il méritait cette chance, lui qui avait déjà accueilli mes enfants comme les siens. Grâce à lui, j’ai découvert une vision de la famille que je n’osais même plus espérer. Aujourd’hui, notre foyer déborde d’amour. C’est presque irréel. Et pourtant, c’est notre réalité.

Comment vos enfants ont-ils vécu l’arrivée de Paul, puis celle de Rainbow ?

Quand Paul est entré dans nos vies, tout s’est fait naturellement. Il n’y avait ni précipitation, ni résistance. Nous étions prêts. Contrairement à ce qu’on dit parfois, je crois profondément que les bonnes personnes arrivent toujours au bon moment.

Il nous a fallu du temps pour former une famille. Deux ans pour apprendre à coexister, pour que je désapprenne à tout faire seule, à tout contrôler. C’était difficile de lâcher prise, de déléguer. Confier ses enfants à quelqu’un d’autre, même par amour, demande un acte de foi.

Finley et Sandy ont tout de suite accroché avec Paul. Mais je ne me fiais pas seulement à mes sentiments – je regardais les leurs. Leur lien avec lui m’a rassurée. Jamais je n’avais vu quelqu’un les aimer aussi librement, sans condition.

Et puis il y a eu Rainbow. Sa naissance est arrivée à un moment parfait. Nous avons fait en sorte que chacun trouve sa place, que personne ne se sente oublié. Même fatiguée, même enceinte, j’ai tout mis en œuvre pour maintenir cet équilibre. La naissance de Rainbow, dans notre salon, a été une expérience partagée : ses frère et sœur étaient présents. Ce moment les a unis pour toujours.

En repensant à votre parcours de maman solo, qu’avez-vous découvert sur vous-même ?

J’ai découvert que j’étais capable de me relever seule, de créer une vie stable, douce et forte pour mes enfants et moi. J’ai appris à me faire confiance. Ce parcours m’a rendue plus libre, plus lucide et plus ancrée. Être seule a été ma plus grande école.

Comment avez-vous trouvé la force de croire en l’avenir ?

Je me suis donnée une seconde chance, pour moi et pour mes enfants. J’ai décidé que nous méritions mieux, que nous pouvions créer un avenir à notre image. Et chaque jour, cet objectif me portait. Même dans la fatigue, dans les doutes, c’était l’amour pour mes enfants qui me tenait debout. Rien d’autre n’aurait suffi.

Accoucher autrement : l’expérience de la naissance de Rainbow

Qu’est-ce qui vous a menée vers un accouchement libre ?

Accoucher librement, chez moi, était une évidence. Je savais que j’en étais capable. Après Finley et Sandy, je ne pensais plus revivre une grossesse. Alors cette chance, je l’ai saisie avec une profonde gratitude.

En tant que doula, j’ai vu toutes les facettes de la naissance. Et j’étais épuisée par les accouchements hospitaliers, trop souvent déconnectés du corps des femmes. Trop de peur, trop de contrôle, trop de dépossession. Je ne voulais plus accompagner ces situations. J’ai donc choisi d’en faire autrement pour moi.

Rainbow est née dans notre salon. Et cette naissance m’a transformée. J’ai compris que personne ne devrait être présent à une naissance sans y être intimement invité. Les enfants, les femmes proches, les partenaires aimants : cela suffit. Je ne crois plus aux présences rémunérées dans cet espace si sacré.

Je sais que c’est radical. Mais mon expérience l’a été aussi. Je ne peux plus soutenir un système où la peur est exploitée. Je resterai toujours doula dans l’âme, mais je ne le ferai plus comme métier. Je cherche aujourd’hui une nouvelle manière d’incarner mes convictions.

Qu’avez-vous ressenti en accueillant Rainbow dans ce cocon si intime ?

Un sentiment immense de confiance. En moi, en mes capacités. J’ai retrouvé quelque chose de profondément enfoui en nous, femmes, génération après génération. Accoucher librement, c’est reprendre un droit volé. C’est dire à la peur qu’elle n’a plus sa place. Et cela change tout.

Ce que la maternité m’a appris sur les autres femmes

En tant que doula, comment votre propre expérience de mère a-t-elle nourri votre accompagnement ?

Ma force intérieure, mon chemin de résilience, c’est ce que les femmes voyaient en moi. Je les guidais vers cette puissance qu’elles avaient déjà, mais qu’elles n’avaient pas encore osé activer. Une doula ne fait pas à la place. Elle rappelle à la femme qu’elle peut. Et ça, c’est une décision que chaque femme doit prendre seule.

Quels conseils donneriez-vous aux femmes qui se lancent dans la maternité, surtout si elles se sentent seules ?

Vous êtes seule. Nous le sommes toutes, au fond. Et c’est dans cette solitude que vous trouverez votre force. Rien ni personne ne vous sauvera. Vous êtes tout ce dont vous avez besoin. Et quand vous réalisez cela, vous devenez invincible. Vous accédez à une puissance inaltérable.

Ce que vous choisissez pour votre accouchement, votre vie, vos enfants… tout cela vous appartient. Mais si vous abandonnez ce pouvoir, vous dites : “Je ne suis pas capable”. Et c’est faux. Le monde de la naissance est politique. Ce que nous vivons dans cet espace reflète la société. Il est temps de s’en rendre compte.

Trouver la balance

Comment jonglez-vous entre vos rôles de femme, mère et épouse ?

Ce n’est pas simple. Personne n’a tout en main, tout le temps. Mais je fais de mon mieux. Je veille à ce que chacun ait ce dont il a besoin. Et souvent, cela signifie que je passe en dernier. Comme beaucoup de mères.

Il y a du chaos, oui. Mais un chaos doux. Avec trois enfants, on apprend à être efficace, à trouver du temps pour ceux qu’on aime. Je suis toujours là pour mes amis, pour ma famille, pour mon mari. Le secret ? L’engagement. Les personnes occupées trouvent toujours du temps. C’est une question de priorité.

Avec tout ce que vous avez traversé, de quoi êtes-vous la plus fière aujourd’hui ?

De la femme que je suis devenue. De la vie que j’ai construite. De ne jamais avoir trahi mes valeurs. J’ai tenu bon, même quand c’était difficile. Et aujourd’hui, je vois les fruits de ce chemin. Ma vie n’a rien d’un hasard. Elle est le résultat de choix alignés. Et ça, c’est ma plus grande fierté.

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